fbpx

Op-eds

Hydro-Québec va-t-il débrancher le bitcoin?

En janvier dernier, le PDG d’Hydro-Québec évoquait une « spirale de la mort » pour la société d’État. 

Citant une étude démontrant que la maison intelligente, qui peut produire une partie de son énergie, pourrait être rentable au Québec à partir de 2025, le PDG Éric Martel disait : « Si les gens commencent à autoproduire avec du solaire, ils consommeront moins. Mais on a autant de transformateurs, de fils électriques à acheter. Donc, les tarifs vont monter. Ce qui va rendre l’autoproduction encore plus rentable. C’est ça, la spirale meurtrière »

En bon PDG, M. Martel concluait que la bonne chose à faire, pour Hydro, était de tout faire pour attirer au Québec des entreprises énergivores. Il citait entre autres les géants du Web comme Facebook et Microsoft. L’arrivée des mineurs de cryptomonnaies cadre parfaitement avec cette stratégie, avec leurs projets représentant plusieurs milliers de mégawatts. C’est pourquoi Hydro a commencé à les courtiser.

Mais voilà qu’Hydro-Québec « s’est fait confisquer la gestion du marché des cryptomonnaies et a reçu l’ordre d’attendre tranquillement les nouvelles instructions du gouvernement Couillard », selon Les Affaires.

Suite à cet article, Hydro Québec a voulu rectifier le tir en affirmant ne pas fermer la porte aux entreprises de minage de cryptomonnaies, mais vouloir en fait chercher les « meilleurs joueurs ». On revient donc à la bonne vieille méthode gouvernementale de choisir les gagnants et les perdants, plutôt que de laisser les consommateurs, les entrepreneurs et les investisseurs s’exprimer.

Le gouvernement va donc mettre des bâtons dans les roues d’entreprises technologiques innovantes pour des raisons qui ne sont pas encore connues. Les entreprises qui minent des cryptomonnaies créent pourtant de l’emploi et de la richesse. Bitfarms par exemple, une entreprise québécoise, a décidé d’investir 250 millions $ à Sherbrooke. Elle créera 250 emplois dans le parc industriel régional.

Aussi, et au-delà des applications concrètes que la technologie des chaînes de blocs entraînera dans une foule d’industries, comme en agriculture, la technologie sur laquelle reposent les cryptomonnaies est intéressante à plusieurs points de vue : elle encourage l’entrepreneuriat, intéresse davantage de gens aux enjeux de l’investissement et aux questions monétaires, encourage la collaboration, et recèle un potentiel d’innovation important.

C’est donc étrange qu’Hydro-Québec, qui fournit de l’énergie à rabais notamment aux grandes alumineries, décide de se lier les mains et de limiter le nombre de ses clients quand vient le temps de fournir de l’électricité à des entreprises légitimes qui ont de gros besoins. Ça pourrait bien signifier que plusieurs entreprises vont décider de s’installer ailleurs.

Comme nous le notions déjà en 2014, le plus grand obstacle à Bitcoin demeure le fait qu’il œuvre encore à l’intérieur d’une zone grise réglementaire. Bien qu’il s’agisse d’une innovation fascinante ayant un bon potentiel de succès, son usage à grande échelle repose sur le renforcement de la confiance des investisseurs pour mitiger les risques et craintes qui demeurent présents. La frilosité du gouvernement actuel à Québec ne fait que confirmer ce fait.

Bitcoin et les autres cryptomonnaies, comme d’autres industries qui vont utiliser le minage, sont des industries d’avenir. Le Québec devrait se positionner avantageusement dès maintenant dans cette industrie, plutôt que d’avoir à pédaler dans le futur pour rattraper le temps perdu.

Avec toutes les entreprises en intelligence artificielle qui s’installent à Montréal, cette décision d’Hydro et du gouvernement envoie un signal contradictoire : d’un côté, on est prêt à faire des affaires, tandis que de l’autre, on veut fermer les vannes. Faudrait dire au gouvernement de se brancher, pas de les débrancher!

Jasmin Guénette is Vice President of Operations at the Montreal Economic Institute. The views reflected in this op-ed are his own.

Back to top