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Textes d'opinion

CHSLD : le privé dans le public, ça fonctionne

Le Québec compte des écoles et des garderies privées. Dans les deux cas, cela répond à des besoins des parents – et des enfants –, là où le système public ne suffit pas à la demande, ou simplement pour donner d’autres options.

Ce choix qui est offert répond manifestement aux besoins de centaines de milliers, voire de millions de Québécois, mais il est parfois critiqué. Comment juger de la qualité de ce qui n’est pas entièrement comparable?

Le taux de diplomation des écoles privées est nettement supérieur à celui des écoles publiques, mais on doit reconnaître que la clientèle n’est pas tout à fait la même, pour des raisons évidentes. Du côté des garderies, même si la qualité va évidemment varier d’un établissement à l’autre, celles du réseau public semblent globalement avoir un avantage. Cependant, la contribution que les CPE reçoivent pour chaque enfant est plus élevée que celle versée aux garderies privées subventionnées, et plus élevée aussi que le tarif qui est généralement payé par les parents dans les garderies non subventionnées.

Ces comparaisons sont donc imparfaites. Mais il y a un domaine où il est possible de faire une comparaison directe de la qualité des services fournis par les entrepreneurs et ceux par l’État, et le résultat est fort intéressant.

Des CHSLD pareils, mais pas pareils

À l’instar des écoles et des garderies, le Québec compte des CHSLD publics et des CHSLD privés. Ces établissements logent nos parents et nos grands-parents lorsque ceux-ci ont un besoin de soins trop grands pour demeurer à domicile ou qu’ils ne sont plus assez autonomes pour habiter une résidence pour personnes âgées traditionnelle. Sur les 432 CHSLD que compte le réseau public, dont le loyer est subventionné par le gouvernement, on trouve une soixantaine d’établissements dits « privés conventionnés ».

Du point de vue de l’usager, les CHSLD privés conventionnés sont parfaitement intégrés au réseau public : le loyer à payer, le financement et le mode d’accès sont identiques à ceux des CHSLD gérés par l’État, de même que les conditions de travail. (On ne doit cependant pas les confondre avec les CHSLD privés non conventionnés, avec qui le gouvernement prend parfois des ententes.)

Les CHSLD privés conventionnés se distinguent cependant des CHSLD « publics-publics » sous un aspect important : la qualité. C’est le ministère de la Santé qui le dit, même s’il ne semble pas trop vouloir que ça se sache.

Un rapport daté de 2016, produit par le ministère et qui compile les résultats des visites dans un peu plus de 208 CHSLD, est révélateur. Les établissements visités sont classés selon la qualité de leur milieu de vie : très adéquat, acceptable, préoccupant. Cela va comme suit :

  • 17 % des CHSLD publics (27 sur 162) ont reçu la mention « très adéquat », la plus favorable, contre 70 % des CHSLD privés conventionnés (21 sur 30);
  • 15 % des CHSLD publics (24 sur 162) ont reçu la mention « préoccupant », contre aucun CHSLD privé conventionné;
  • La grande majorité des CHSLD publics, soit 69 % (111 sur 162) ont reçu la mention « acceptable », contre seulement 30 % (9 sur 20).

Même les CHSLD privés non conventionnés, qui ne reçoivent pas de fonds de l’État et n’ont généralement pas les mêmes moyens que les CHSLD subventionnés, semblent réussir à faire au moins aussi bien, sinon un peu mieux que ceux gérés par l’État : 25 % (4 sur 16) ont été qualifiés de « très adéquat », 62,5 % (10 sur 16) ont été qualifiés d’« acceptable » et 12,5 % (2 sur 16) de « préoccupants ».

Mais revenons aux CHSLD privés conventionnés. Le plus beau de l’affaire? Ils sont également moins coûteux pour l’État. Comme ils n’ont pas le droit de faire de profit sur l’enveloppe allouée aux soins, les montants non utilisés à ce chapitre doivent être retournés au gouvernement. Et comme il s’agit d’entreprises privées, elles paient des impôts. Certains propriétaires considèrent que le modèle d’affaires est suffisamment profitable pour avoir plus d’un établissement, et semblent même en vouloir plus.

On résume : le coût pour le patient est le même mais il est un peu moindre pour l’État, l’accès est le même, les conditions de travail des employés sont les mêmes, et le service est supérieur. On attend quoi pour utiliser davantage le modèle et, pourquoi pas, l’étendre aux hôpitaux?

Patrick Déry est analyste en politiques publiques à l’Institut économique de Montréal. Il est l’auteur de « Faire appel à l’entrepreneuriat pour héberger et soigner nos aînés » et signe ce texte à titre personnel.

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