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Textes d'opinion

Pour favoriser l’entrepreneuriat, Ottawa devrait s’inspirer des Autrichiens

Dans le paysage politique canadien, tous les politiciens prétendent vouloir aider les entrepreneurs. Il existe toutefois une confusion considérable au sujet des politiques publiques qui favorisent effectivement l’esprit d’entreprise. Il n’est pas inhabituel que les réformes aient à la fois des opposants qui pensent qu’elles nuiront aux petites entreprises et des partisans qui pensent qu’elles les soutiendront. La réforme de la fiscalité des petites entreprises du ministre des Finances Bill Morneau en est un excellent exemple. Les politiciens profitent souvent de cette confusion pour proposer diverses mesures interventionnistes censées encourager l’entrepreneuriat.

Une façon pour les décideurs politiques d’Ottawa d’éclaircir cette confusion et de baser les politiques publiques sur une bonne compréhension de l’entrepreneuriat serait de s’inspirer des recherches de l’école autrichienne d’économie.

L’économie autrichienne fait référence à un type d’analyse économique qui, historiquement, a ses racines chez les universitaires de l’Université de Vienne, en Autriche, d’où le nom. De nos jours, c’est une approche qui compte des praticiens à travers le monde. L’une de ses principales caractéristiques est de considérer les phénomènes économiques, ainsi que de nombreux autres types d’interactions humaines, en termes de processus entrepreneuriaux. Elle fournit une meilleure compréhension de ce qui signifie vraiment d’agir de façon entrepreneuriale et être vigilant face aux opportunités d’affaires, et ce même au-delà du monde de l’entreprise.

En fait, tous les aspects les plus positifs de l’économie de marché sont le résultat de l’action entrepreneuriale. De l’innovation à la croissance, à l’allocation des ressources, en fin de compte tout est le produit d’entrepreneurs qui sont attentifs aux opportunités et qui innovent pour faire concurrence aux autres entrepreneurs.

Les bonnes politiques publiques peuvent encourager ces processus et orienter l’activité entrepreneuriale vers les types de résolution de problème qui sont utiles à la société — le genre d’entrepreneuriat qui est productif, propice à la croissance et qui introduit constamment de nouveaux produits et services, ainsi que de nouvelles façons de les obtenir. De telles politiques renforcent les principes de base qui permettent à la propriété privée, aux prix et aux signaux de profits et de pertes d’exister et de fournir l’information, les incitations et les innovations correspondantes. C’est ce qui permet l’activité entrepreneuriale dans l’économie de marché.

Les mauvaises politiques publiques, par opposition, vont distraire les entrepreneurs des projets productifs et rendre d’autres types d’opportunités plus attrayantes. Pour n’en nommer que quelques-unes, ces politiques peuvent prendre la forme d’impôts excessifs sur le revenu des particuliers et des sociétés et sur le gain en capital, de la réglementation du travail, d’un fardeau réglementaire trop lourd dans de nombreuses industries, de limites au commerce provincial et international et d’un système de quotas pour les produits laitiers, la volaille et les œufs.

Le résultat de ces politiques publiques est de rendre certains projets entrepreneuriaux impossibles en faisant augmenter les coûts qui leur sont associés. Elles réduisent les incitations, l’information et, en fin de compte, l’innovation chez les entrepreneurs, qui se dirigent alors vers d’autres projets, moins productifs pour la société. Les dépenses publiques élevées et la mainmise du gouvernement sur certaines industries spécifiques, telles que la santé ou la distribution d’alcool, évincent l’entrepreneuriat dans des secteurs qui en bénéficieraient grandement. Dans certains cas, le gouvernement interdit d’entrée de jeux aux entrepreneurs de poursuivre certaines opportunités.

L’analyse de l’économie autrichienne suggère que, avant tout, les décideurs politiques devraient être guidés par le principe: « Tout d’abord, ne pas causer de tort ». Avant de mettre en œuvre des politiques visant à promouvoir directement l’entrepreneuriat, par exemple les subventions soutenant la création d’entreprise, il serait préférable de supprimer les obstacles qui gênent les entrepreneurs.

Bien entendu, l’entrepreneuriat se porte relativement bien au Canada, même si certaines politiques publiques ne contribuent pas à cet état de choses. L’économie autrichienne fournit une grille d’analyse riche qui peut aider à mieux comprendre les mesures politiques qui nuisent à l’entrepreneuriat. Si nous ne faisons rien pour changer ces politiques publiques, nous laissons de l’argent sur la table, métaphoriquement parlant, en ne faisant pas tout en notre possible pour pousser les Canadiens vers un entrepreneuriat productif.

Écrit avec la collaboration de Peter J. Boettke.

Mathieu Bédard est économiste à l’Institut économique de Montréal, Peter J. Boettke, professeur d’économie et de philosophie à George Mason University. Ils sont les auteurs de « Comment encourager l’entrepreneuriat au Canada : les enseignements de l’école autrichienne d’économie » et signent ce texte à titre personnel.

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