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Textes d'opinion

Paradoxe minier au Québec

Lors de la dernière campagne électorale, une publicité du Parti québécois montrait un énorme camion minier ouvrir sa benne qui ne contenait en définitive que quelques cailloux. Le message était limpide: l'industrie minière contribuait trop peu aux recettes de l'État selon le PQ. En toute cohérence avec son programme, le gouvernement du PQ souhaite donc revoir le régime de redevances minières.

Seul hic, le boom minier s'est plutôt dégonflé depuis. Dans le secteur des ressources naturelles, plusieurs projets sont remis à plus tard. La dernière mise à jour économique et financière du gouvernement montre d'ailleurs que les prévisions de redevances ont été revues à la baisse de 20 % pour 2013-2014.

En toute logique, ceux qui veulent alourdir le fardeau fiscal des compagnies minières n'ont pas vraiment intérêt à revoir le régime des redevances au moment où ce secteur connaît un ralentissement important. Il serait pour le moins paradoxal d'augmenter les impôts de ces dernières au moment où les investissements prévus sont plus incertains que jamais!

Autre exemple: aux Iles-de-la-Madeleine, on songe depuis 2008 à explorer le potentiel de gaz naturel. Normalement, si on trouve un potentiel exploitable, il y a automatiquement intervention du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (le BAPE). Le gouvernement a plutôt décidé de confier immédiatement un mandat au BAPE, afin de connaître à l'avance les effets d'une exploitation des hydrocarbures. On ne sait même pas s'il y en a, ou pas, de ces hydrocarbures exploitables! Voilà qui verse allégrement dans le paradoxe temporel.

Ici, le gouvernement n'est pas le seul dont le comportement apparaît paradoxal. Certains craignent l'exploitation gazière et ses conséquences sur l'environnement, comme c'est le cas ailleurs aussi. Sauf qu'aux Iles-de-la-Madeleine, l'électricité est produite dans une centrale thermique utilisant du mazout. Utiliser du gaz naturel serait nettement moins polluant, diminuerait les émissions de gaz à effet de serre, et pourrait même réduire le coût de production de l'électricité! C'est vrai que les Madelinots ne paient pas vraiment le coût de leur électricité, ils sont subventionnés par des tarifs identiques au reste de la province. Mais là n'est pas la question. La question, c'est veut-on améliorer la qualité de l'environnement ou pas?

Même sans être d'accord, on peut toujours comprendre une position dans la mesure où celle-ci est cohérente.

  • Vouloir augmenter les redevances versées en augmentant le fardeau fiscal d'une industrie en ralentissement n'est pas très cohérent.
  • Faire faire des études avant même qu'on en ait besoin non plus.
  • Bloquer un projet qui pourrait améliorer la qualité de l'air et réduire les émissions de GES au nom de l'environnement, non plus.

De tels paradoxes ne sont pas particulièrement rassurants pour l'avenir du secteur des ressources naturelles au Québec. Alors que la publicité du gros camion montrait quatre cailloux pour représenter 300 millions de dollars, à quelle image doit-on s'attendre pour la prochaine campagne électorale? Y aura-t-il même encore un camion?

Youri Chassin est économiste à l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.

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