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Textes d'opinion

Une petite faveur

Chaque année, vous versez plus de 1 300 $ de vos impôts, transformés sous forme de subventions, de prêts sans intérêt et de garanties de prêts, aux entreprises.

Mais ce n’est pas assez. L’industrie aéronautique – grande bénéficiaire de ce système avec l’industrie automobile – affirme, en marge de son congrès d’Ottawa, que le gouvernement doit en faire plus pour l’aider. J’allais vous expliquer que les subventions ne créent pas d’emplois. Qu’on prend simplement à Pierre pour donner à Paul. Que malgré des milliards en subventions, aucun emploi (au net) n’a été créé chez les fabricants d’avions et de pièces d’avions au Québec depuis 10 ans.

Mais pourquoi être négatif? Soyons solidaires. J’accepte d’aider mes confrères de l’aéronautique. Mais en échange, je leur demande une petite faveur. J’ai un projet: publier un livre. J’ai beaucoup de talent et suis certain que ce sera un succès. Je demande aux milliers d’employés de l’aéronautique de me prêter chacun 25 $. Je vous rembourserai dans 20 ans. Ce sera, bien sûr, un prêt sans intérêt. Et je vous rembourse seulement si je vends mes livres. Si je ne vends rien, je ne rembourse rien.

Vous refusez? Mais voyons, mon projet va générer des retombées économiques. La maison d’édition fera des profits, j’achèterai des logiciels de correction, du papier, j’engagerai des recherchistes, je mangerai dans les restaurants autour de chez moi, me ferai construire un beau bureau… Avec l’impôt payé par tous ces travailleurs, et les taxes générées par la vente des livres, le gouvernement va faire un coup d’argent! Et puis, il est vital que notre industrie du livre brille et soit concurrentielle. Un auteur français qui écrit sur le même sujet que moi reçoit des subventions de son gouvernement. Il serait injuste et suicidaire pour notre industrie de ne pas me subventionner aussi.

Vous refusez toujours? Vous préférez mettre votre 25 $ dans un placement à faible risque qui vous rapportera des intérêts de 5 % composés annuellement et vous enrichira de 66 $, au lieu du 25 $ incertain que je vous propose? Vous dites qu’il est plus important pour vous de placer cet argent pour l’éducation de votre enfant que de l’utiliser pour fabriquer des livres (des avions) que vous ne comptez pas utiliser? Je n’y comprends rien… Mais peu importe votre décision. Vous n’avez pas le choix. Mon bon ami le ministre vous oblige à me prêter cette somme. Sinon, vous irez en prison. Lui, il croit que c’est un bon projet. Après tout, qui êtes-vous pour prétendre savoir quoi faire avec votre argent?

David Descôteaux est économiste à l’Institut économique de Montréal.

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