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Textes d'opinion

Le «paternalisme mou» de Harper

Le budget a été déposé et le verdict est maintenant connu: les baisses d’impôt joueront un rôle central dans l’action du nouveau gouvernement Harper. Les réductions annoncées de l’impôt sur le revenu sont encore plus importantes que prévu. En plus de la réduction promise de 1% de la TPS, le ministre Flaherty a dévoilé d’autres mesures, dont l’augmentation du montant personnel de base à 10 000 $ en 2009, et l’ajout d’un «crédit canadien pour emploi» similaire à celui qui existe déjà au Québec, qui fera économiser quelques centaines de dollars aux travailleurs.

Les entreprises pourront aussi bénéficier d’une réduction du fardeau fiscal, avec l’élimination plus tôt que prévu de la taxe sur le capital, l’élimination de la surtaxe des sociétés et la réduction du taux général d’imposition, qui passera de 21% à 19% en 2010.

Le seul point négatif sur ce plan est l’augmentation du taux d’imposition personnel le plus bas de 15% à 15,5%, qui reprend la moitié de la réduction annoncée par le précédent gouvernement.

Si l’on regarde plus loin que les chiffres, on observe par ailleurs une tendance intéressante. Bien que les dépenses soient toujours à la hausse, le budget laisse entrevoir un État moins gros. Cela ne se fait pas uniquement au moyen de réductions d’impôt, mais aussi par l’entremise d’avantages fiscaux qui incitent les citoyens à choisir certains types de comportement plutôt que d’autres.

Ce budget encourage plusieurs choix bénéfiques autant pour les individus que pour la société, tout en abaissant le coût de l’intervention gouvernementale: le crédit d’impôt pour le transport en commun, celui pour les pour les activités sportives des jeunes, la déduction fiscale sur les manuels scolaires, etc. Sans augmenter les dépenses, toutes ces mesures permettent d’atteindre graduellement les résultats voulus par le gouvernement; elles permettent de réduire la taille de l’État sans avoir à couper nulle part.

Les conservateurs utilisent donc la politique fiscale pour atteindre leurs objectifs sociaux. Plutôt que de créer de nouveaux programmes gouvernementaux prêchant les vertus de l’exercice physique, du transport en commun et de l’éducation, ils utilisent le régime fiscal pour inciter les citoyens à adopter leur vision. L’expression «paternalisme mou» (soft paternalism) est peut-être celle qui décrit le mieux cette approche. Le magazine britannique The Economist a récemment consacré un long article à cette tendance. Plutôt que d’imposer leurs choix, les gouvernements tendent de plus en plus à inciter leurs citoyens à faire des choix jugés bénéfiques. Au lieu d’avoir un État-providence autoritaire, une main quasi invisible indique les «bons» choix aux citoyens.

Il est certain que des baisses d’impôts moins ciblées, comme par exemple le maintien du taux minimum d’imposition sur le revenu à 15%, auraient offert plus de choix aux citoyens. Mais dans la mesure où les gouvernements insistent pour transformer la société, il est certainement mieux de laisser les citoyens choisir la carotte des crédits d’impôt plutôt que de se faire imposer le bâton des programmes obligatoires et des taxes punitives. Avec ses baisses d’impôt pour les individus et les entreprises, ce budget est un pas dans la bonne direction et offre des avantages économiques réels aux Québécois et aux autres Canadiens.

Tasha Kheiriddin est vice-présidente exécutive de l’Institut économique de Montréal.

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