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Op-eds

Le vrai problème du Canada, c’est sa productivité anémique

Le ministre des finances fédéral, Bill Morneau, a déposé le 24 octobre une mise à jour économique et financière. Il y annonçait une réduction du déficit pour l’année en cours en raison d’une croissance économique plus élevée que prévu cette année, mais celui-ci sera néanmoins de près de 20 milliards $. Plutôt que de viser une élimination du déficit, le gouvernement a décidé d’en profiter pour augmenter notamment les dépenses sociales, dans le but avoué de « stimuler l’économie » par des hausses de dépenses de consommation.

Malheureusement, le diagnostic de M. Morneau passe à côté des vrais problèmes de l’économie canadienne : notre productivité croît à un taux anémique, ce qui fait que depuis 35 ans, la croissance économique canadienne a été moindre que celle de la plupart des autres pays développés, dont les États-Unis. Il est bon de rappeler ce point important : la croissance à long terme n’est pas causée par les augmentations de dépenses de consommation, mais plutôt par l’augmentation de notre productivité.

La consommation, elle, croît à long terme avec le PIB et les revenus, justement grâce à la croissance de la productivité.

Or, la productivité canadienne n’a augmenté que de 48 % entre 1981 et 2015, contre 67 % aux États-Unis, 75 % en Suède, 64 % en Belgique, 108 % au Japon, etc. (en passant, le chiffre pour le Québec n’est que de 39 %). Cette mauvaise performance relative de notre productivité plombe notre croissance économique, les revenus des gouvernements et, ultimement, les salaires et revenus des Canadiens.

Qu’y a-t-il derrière l’augmentation à long terme de la productivité, qui est le véritable moteur de l’augmentation de notre niveau de vie? Sans surprise, on peut dire que l’investissement des entreprises a un grand rôle à jouer ici. Cet investissement, qui augmente le stock de capital à la disposition des travailleurs, permet à chaque travailleur de produire plus par heure, donc d’être plus productif.

Or, l’investissement ne va pas bien au Canada. Entre le premier trimestre de 2008, donc trois trimestres avant la récession de 2008-09, et le second trimestre 2017, l’investissement réel des entreprises en usines, bâtiments, machines, équipements et propriété intellectuelle a baissé de 6 %. Pendant ce temps, le PIB réel augmentait de 17 % (données de Statistique Canada). Incidemment, l’investissement privé en proportion du PIB a chuté de près de 20 %. Et la situation empire depuis 2014. Uniquement dans le secteur énergétique canadien, quatre projets valant plus de 84 milliards $ ont été abandonnés en 2017.

Si le gouvernement tient vraiment à ce que les familles canadiennes aient plus d’argent dans leurs poches, il faut s’attaquer au problème de l’investissement. Comment faire? La recette n’est pas compliquée. Premièrement, il faut rendre les investissements plus attrayants, en réduisant le niveau de la règlementation inutile et coûteuse. Ceci est d’autant plus important que ce processus est en train de se produire chez nos voisins américains, nos plus importants clients et concurrents. Deuxièmement, étant donné les fortes baisses d’impôts sur les profits des sociétés que le Congrès américain est à mettre en application, il ne faut pas laisser un écart se creuser en défaveur du Canada. Une uniformisation du taux d’impôt fédéral à 10 % pour l’ensemble des entreprises serait de mise.

Voilà ce qu’on aurait dû retrouver dans la mise à jour de M. Morneau. Dommage que bien peu de dirigeants politiques se préoccupent des vrais problèmes qui minent la performance de l’économie, et des vraies façons de faire augmenter les revenus des ménages à long terme.

Germain Belzile is a Senior Associate Researcher at the MEI. The views reflected in this op-ed are his own.

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