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Pétrole : l’immaturité des écolos

Le gouvernement du Québec vient de publier son projet de règlement sur les forages pétroliers. Ce document de 270 pages établit le « cadre réglementaire le plus strict en Amérique du Nord », selon le ministre Arcand. Cette réglementation, après consultation, devra encadrer les licences et les activités d’exploration, de production, de stockage et de transport d’hydrocarbures.

Nous ne pouvons qu’applaudir cette volonté de rechercher des normes environnementales robustes, voire même parmi les plus avancées au monde, pour encadrer le développement de l’industrie pétrolière et gazière au Québec.

Malheureusement, on assiste déjà à une levée de boucliers parmi les groupes écologistes et même de la part de la fédération des municipalités du Québec (FQM), dont le président critique « l’absence totale d’acceptabilité sociale » pour tous les projets reliés au pétrole et au gaz naturel. Si l’acceptabilité sociale signifiait l’unanimité, on ne ferait plus rien.

En fait, les protestations ne sont pas tant dirigées vers le détail de la réglementation que sur l’idée même de production d’hydrocarbures au Québec. Si l’on se fie aux commentaires de plusieurs représentants d’organisations écologistes ou même du président de la FQM, le débat autour de la distance entre une résidence et une tête de puits devrait plutôt se faire au sujet de la distance entre le Québec et ces installations.

Ni « vert », ni « progressiste »

Il faut faire preuve d’une immense immaturité pour vouloir empêcher complètement et totalement l’émergence d’une éventuelle industrie pétrolière et gazière au Québec, et ce pour plusieurs raisons. Premièrement, les Québécois consomment plus de 200 millions de barils de pétrole chaque année. Importer ce pétrole de pays qui n’ont souvent pas des normes aussi élevées en matières environnementales ou de droits de la personne n’a rien de « vert » ou de « progressiste ».

Deuxièmement, le Québec est maintenant en avant-dernière place au Canada pour le revenu médian des ménages. Or, les salaires versés dans le secteur pétrolier et gazier sont bien plus élevés que la moyenne. Comme par hasard, le Québec est la seule province canadienne (à part l’Île-du-Prince-Édouard) à ne pas produire de pétrole ou de gaz naturel. Les trois provinces où ce secteur est le plus important, soit l’Alberta, la Saskatchewan et Terre-Neuve, sont parmi celles où la croissance du revenu médian réel a été la plus forte entre 2005 et 2015 (de 24 à 36,5 %, contre 8,9 % au Québec). Laisser passer ainsi des opportunités de créer de la richesse, ça finit par avoir des effets majeurs sur le niveau de vie.

Troisièmement, les Québécois veulent en majorité qu’on exploite des ressources pétrolières au Québec, plutôt que de les importer. Dans un sondage Léger paru en mai 2017, 56 % des Québécois préféraient l’option de la production québécoise, contre 20 % qui souhaitaient que l’on continue à importer le pétrole comme maintenant et 20 % qui préféraient ne pas répondre (peut-être en raison de la dissonance cognitive causée par la reconnaissance qu’on en consomme).

Finalement, parce que la fameuse transition énergétique va éventuellement arriver, mais on en est encore loin. Selon l’Agence Internationale de l’Énergie (IEA), la demande mondiale d’énergie va augmenter de 30 % entre 2015 et 2040. Même si les énergies renouvelables jouent un rôle de plus en plus important, l’IEA prévoit que la demande de gaz naturel va augmenter de 50 % au cours de la même période, en bonne partie aux dépens du charbon, et celle du pétrole, de 12 %. Et le Québec ne fera pas exception à cette tendance : on consomme et on consommera encore pour un bon moment des hydrocarbures.

Il est temps de passer outre à la minorité tonitruante qui souffre du syndrome « Pas dans ma cour » ou pire, du syndrome BANANA, comme on dit en anglais : Build Absolutely Nothing Anytime Near Anything. Établissons donc des règles nécessaires et sécuritaires pour encadrer l’industrie et faisons profiter l’ensemble des Québécois de ces ressources naturelles à notre portée, n’en déplaise à ceux qui s’opposent à tout, tout le temps.

Germain Belzile is a Senior Associate Researcher at the MEI. The views reflected in this op-ed are his own.

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