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Groupes de pression: Facal a raison

Le président du Conseil du Trésor, Joseph Facal, a causé tout un émoi au lendemain des dernières élections partielles et encore la semaine dernière, lorsqu’il a accusé les dirigeants de son parti d’accorder trop d’importance aux porte-parole des lobbies organisés et de négliger la classe moyenne.

M. Facal a touché une corde sensible car, souvent, nos gouvernements n’hésitent pas à favoriser les groupes de pression aux dépens de l’ensemble des contribuables. Ainsi, le prix du lait et les coûts de la main-d’oeuvre dans l’industrie de la construction sont maintenus artificiellement élevés afin d’en faire bénéficier les puissants lobbies des producteurs agricoles et des syndicats de la construction. Les consommateurs paient ainsi une facture plus salée que le prix réel du marché.

De telles situations n’ont cependant rien d’étonnant selon les théoriciens des «choix publics» (l’École du Public Choice) qui s’intéressent aux processus menant à la prise de décisions des politiciens et des fonctionnaires.

Selon ces théoriciens, dont les plus connus sont les économistes James Buchanan et Gordon Tullock, l’État n’est pas le reflet d’une abstraite volonté collective, mais une organisation où les décisions sont prises par des êtres humains ni meilleurs ni pires que les autres. Il y a toutefois une différence fondamentale entre le marché économique et le marché politique. Dans le marché économique, les gens risquent leur propre argent et prospèrent en convaincant leurs concitoyens de la valeur de leur produit. Dans le marché politique, les «marchandises» sont des faveurs et des privilèges que l’on fournit avec l’argent des autres. Ces deux modes de fonctionnement ont des conséquences radicalement différentes sur le rôle joué par les individus. Dans le marché privé, tous les consommateurs ont leur mot à dire en achetant ou en refusant d’acheter les produits et les services offerts. Leur influence est directe.

Dans le marché politique, les électeurs ne votent qu’une fois tous les quatre ans pour un parti qui prend position sur une foule de sujets. Investir quotidiennement du temps et des efforts pour tenter d’influencer toutes les politiques qui pourraient les affecter serait à peu près impossible et irrationnel du point de vue de l’allocation de la ressource ultime qu’est le temps.

Par contre, l’enjeu est important pour les groupes de pression, dont l’influence est beaucoup plus grande que celle d’un individu isolé. Ils font donc tout en leur pouvoir pour s’assurer que les programmes gouvernementaux convergent avec leurs intérêts.

La dynamique politique provoque des effets pervers dans la gestion des organisations. Les employés des groupes de pression n’ont jamais intérêt à dire que les choses s’améliorent dans leur domaine. De même, les employés des ministères qui traitent de ces questions et qui financent ces groupes augmentent leur budget, et par conséquent, leur influence, en créant de nouveaux «plans stratégiques» et autres «interventions structurantes».

Le ministre Facal connaît l’école du Public Choice et comprend bien cette dynamique. Contrairement à plusieurs politiciens, il a aussi compris que la majorité des électeurs sont excédés de voir leur gouvernement pris en otage par les groupes de pression. Espérons que davantage de ses collègues entendront son message.

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